Les différentes façons de mal voir


La malvoyance n'est pas une maladie, mais la conséquence de pathologies diverses pouvant affecter :

  • la vision centrale ;
  • la vision périphérique ;
  • les deux associées.


Une personne malvoyante est une personne dont la déficience visuelle entraîne une incapacité dans l’exécution d’une ou plusieurs des activités suivantes :

  • lecture et écriture (vision de près) ;
  • activités de la vie quotidienne (vision à moyenne distance) ;
  • communication (vision de près et à moyenne distance) ;
  • appréhension de l’espace et des déplacements (vision de loin) ;
  • poursuite d’une activité exigeant le maintien prolongé de l’attention visuelle. »

Définition de la malvoyance, Union européenne des aveugles, Athènes, novembre 2003.

La personne malvoyante n'appartient pas au monde de la cécité ; elle n'éprouve pas les mêmes difficultés.

A- Les quatre principaux types de malvoyance


A1. Atteinte de la vision centrale

Avoir une atteinte de la partie centrale de la rétine entraîne une baisse importante de l’acuité visuelle. La perte ou l’altération de la vision dans cette zone, au niveau du point de fixation, est plus ou moins étendue. Bouger l’œil ne supprime pas la gêne.
Les personnes ayant ce type d’atteinte sont handicapées en vision de près et dans toutes les activités qui nécessitent un contrôle visuel précis : lecture, écriture …
La perception de l’espace, des grandes formes et du mouvement est conservée et les déplacements restent possibles ; ils sont cependant entravés dans les lieux encombrés.


Une atteinte de la vision centrale nécessite l'utilisation de moyens de grossissement, de se rapprocher de ce que l'on regarde et parfois d’excentrer son regard par rapport à ce que l’on veut voir.
L’apprentissage du Braille peut être préconisé dans certains cas.

« Pour se faire une meilleure idée des conséquences d’une dégénérescence maculaire, tenez votre main à environ 30 cm devant vos yeux. Vous ne pouvez pas voir ce qui est directement en face de vous, mais vous pouvez voir ce qui est sur les côtés de votre main. A présent, sans regarder sur les côtés, essayez de lire quelque chose dans votre vision périphérique. N’oubliez pas de regarder strictement votre main ! Cet exercice montre combien il peut être difficile de lire pour les personnes à un stade avancé d’une dégénérescence maculaire. »

Source : http://www.ideose.eu/documents-accessibilite/handicap-visuel/basse-vision/

A2. Atteinte de la vision périphérique

Les atteintes de la vision périphérique impliquent une réduction du champ visuel. L’acuité visuelle est correcte mais seule la zone fixée peut être vue. Déplacer le regard conduit à perdre ce qui précédemment était vu.
Le handicap résultant de cette atteinte est très invalidant et difficilement compréhensible par l’entourage. En effet, lire est possible à condition que les caractères soient suffisamment petits pour figurer dans le champ visuel restant : une affiche de cinéma, un plan de ville ou les gros titres d’un journal sont plus difficiles à lire qu’une carte de visite, une étiquette de produit alimentaire ou une page d’annuaire téléphonique. Agrandir un écrit est de ce fait préjudiciable.

L’utilisation de la vision centrale nécessite un éclairage suffisant.
Les déplacements sont difficiles, voire impossibles, et limitent de fait l’autonomie :

  • la réduction du champ visuel ne permet pas d’avoir une vision globale immédiate et ne donne de l’environnement que des éléments successifs qu’il faut combiner mentalement pour en comprendre le sens ;
  • dans l’obscurité, au crépuscule ou lors des changements subits ou progressifs des conditions de luminosité (couloir non éclairé, endroit fortement ombragé), les difficultés sont considérables ;
  • la perception du mouvement ou des déplacements qui ne peut être faite qu’en vision centrale demande fixation, poursuite visuelle et coordination des yeux, de la tête et du corps. Il faut cependant avoir pu localiser visuellement le déplacement et que celui-ci ne soit pas trop rapide…

Une vision tubulaire nécessite l'utilisation de moyens d'aide aux déplacements, de s'éloigner de ce que l'on veut voir et de disposer d'un éclairage suffisant. Grossir un texte peut en compliquer la lecture.


A3. Vision floue globalement

Ce type de vision s’apparente à ce que l’on peut voir à travers un verre dépoli. La lumière se diffuse, les formes et les contours sont imprécis, les distances et les reliefs sont difficiles à appréhender, les contrastes et les couleurs sont estompés.
Un environnement confus, plat, terne, perd son attrait et la motivation à regarder, à se déplacer ou à lire n’est plus qu’utilitaire.
La lumière devient vite gênante voire aveuglante : la photophobie (tolérance à la lumière inférieure à la normale) est associée à une vision floue. Les éblouissements (reflets, soleil, phares des voitures…) provoquent des réactions d’évitement et de malaise physique.

Une vision floue nécessite l’utilisation de moyens d’aide aux déplacements, de moyens de grossissement et de se rapprocher de ce que l’on veut voir. L’apprentissage du Braille peut être préconisé dans certains cas.

A4. Atteinte neurovisuelle

Du fait de la complexité des mécanismes de saisie et de traitement des informations visuelles, de nombreuses formes de déficits visuels ne résultant pas d’une atteinte oculaire se situent au niveau des voies visuelles ou des centres corticaux responsables de la vision.

Cécité corticale et hémianopsie :
La lésion entraîne une amputation du champ visuel dont la localisation et l’étendue dépendent de l’atteinte. La perte de vision peut être totale (cécité corticale) ou partielle (hémianopsie), le sujet ne pouvant alors traiter les informations se trouvant dans la partie du champ visuel atteint.

Agnosie visuelle :
Du fait d’une atteinte corticale et bien que le système oculaire fonctionne correctement, le sujet se trouve dans l’incapacité d’identifier ou de reconnaître ce qu’il voit. Les autres sens lui sont alors nécessaires pour identifier l’objet vu ou nommé.

Négligence spatiale :
Dans ce type d’atteinte, le sujet est totalement inconscient de l’espace qui l’entoure, à droite ou à gauche. Il peut ainsi ne se raser que d’un côté, ne lire que les pages de droite, ne représenter qu’une moitié de dessin, ne manger que ce qui se trouve dans la moitié gauche de son assiette, ne se maquiller que d’un côté …

B- Phénomènes pouvant accompagner la déficience visuelle


B1. Le strabisme

Il peut être convergent, divergent ou vertical.
Ce défaut de parallélisme des yeux peut être présent dès la naissance ou n’apparaître qu’après quelques semaines ou quelques mois.
Un strabisme chez le jeune enfant doit être traité dès son apparition. En effet, qu'il soit important ou léger, le strabisme installe très vite un œil "dominant" dont la vision va se développer normalement et un œil "paresseux" dévié dont la fonction visuelle va être stoppée, entravant ainsi le développement de la vision binoculaire.
Si le strabisme est ancien, l'amblyopie - ou vision faible de l'œil - a eu le temps de s'installer et le port de lunettes ou un traitement bien conduit ne peuvent la réduire.

B2. Le nystagmus

Ce sont des mouvements rythmiques involontaires et incontrôlés des globes oculaires, le plus souvent horizontaux mais parfois verticaux ou rotatoires. Lors d'une saccade, l'acuité visuelle est pauvre et la perception visuelle (en rapport avec le cerveau) est réprimée, d'où le côté invalidant du nystagmus.
L'inquiétude et l'effort visuel (fixation et attention) augmentent ce phénomène et en amplifient les effets.
Il peut exister une zone neutre au niveau de laquelle le nystagmus ralentit ou s’arrête pour s’inverser. L’acuité visuelle est alors meilleure dans cette zone. La recherche de cette position de blocage du nystagmus induit des postures particulières (tête tournée sur un côté et regard en coin, par exemple) qu’il ne faut pas contrarier.

Le traitement est difficile mais peut être chirurgicalement possible lorsqu’ une position de blocage existe.

Conséquences du nystagmus :

  • vision floue et efficience variable ;
  • difficulté à maintenir la fixation ;
  • fatigabilité.


B3. La photophobie

Une intolérance excessive à la lumière et aux reflets peut entraîner une impression désagréable, parfois même douloureuse.
Cette gêne se manifeste par des clignements répétés des paupières, une sensation d'éblouissement et des larmoiements.
Elle provoque des réactions ayant pour but d’éviter la lumière.

B4. Les anomalies de la vision des couleurs

Elles peuvent être partielles ou totales.

  • dyschromatopsie : cécité à une couleur ou mauvaise perception des nuances ;
  • achromatopsie : aucune couleur n’est perçue ; seules les différences d’intensité le sont.

Conséquences :

  • impossibilité à percevoir des repères colorés ;
  • certaines professions ne peuvent être envisagées.


B5. Les stéréotypies (blindismes)

Une déficience visuelle profonde peut, à certains moments (stress, émotion intense…), s’accompagner d’une certaine instabilité psychomotrice.
Les comportements les plus fréquents sont des balancements du tronc, des mouvements de la tête, des bras ou des mains, des contorsions du visage, ainsi que des pressions exercées sur les paupières.
Ne pouvant observer les autres, la personne déficiente visuelle n’a pas conscience de l’inadéquation de ses postures qui sont bien souvent considérées comme déviantes par les voyants.


C- Gênes fonctionnelles de l’élève malvoyant


(Source : « Handiscol’ – Guide pour les enseignants qui accueillent un élève malvoyant » - Octobre 1999 -Ministère de l’Education nationale, de la Recherche et de la Technologie)

Ces différentes façons de mal voir provoquent des gênes fonctionnelles qui vont engendrer des difficultés dans la vie quotidienne de l’élève.

C1. Vision de loin floue

L’enfant perçoit mal son environnement :

  • l’enseignant ;
  • ses camarades ;
  • tout ce qui est présenté à plus de deux mètres.

Conséquences :

  • il ne voit pas au tableau ;
  • il ne voit pas les affichages muraux, surtout s’ils sont situés très haut ; il ne peut bénéficier de tout le travail d’imprégnation que ces documents induisent ;
  • il ne peut percevoir un document présenté collectivement ;
  • il suit mal une activité présentée trop loin de lui (éducation physique par exemple) ;
  • il présente donc une tendance à s’isoler, à se désinvestir de l’activité et il peut passer pour étourdi ou distrait.


C2. Vision de près

L’enfant compense sa faible vision en s’approchant le plus possible de son document.

Conséquences :

  • un champ visuel restreint ;
  • aucune vision globale ;
  • une connaissance d’un document par approches successives ;
  • une possibilité d’anticipation très limitée.


C3. Vision périphérique avec scotome central

L’enfant est très à l’aise dans ses déplacements et sa connaissance de l’espace intermédiaire et lointain.

Conséquence : les exercices de lecture sont difficiles voire impossibles selon l’étendue du scotome.

C4. Vision tubulaire

La discrimination visuelle centrale étant intacte, l’élève devrait lire sans difficultés.

Conséquence : des problèmes vont naître, de prises de repères et de localisation dans l’espace-feuille, le champ visuel pouvant être très réduit.

C5. Variation de la qualité de la vision centrale

Beaucoup de variations dans la façon de voir apparaissent au cours de la journée. Elles sont dues :

  • à une fatigue générale ;
  • à une fatigue de concentration ;
  • à une difficulté à s’adapter aux changements lumineux.

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